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Fragmentation de peptides protonées

Mécanismes de photo-fragmentation UV

by Soorkia Satchin - 20 March 2010 (modifié le 19 February 2020)

L’expérience « Arc-en-Ciel » installée au Centre National de Cinétique Rapide - ELYSE (Laboratoire de Chimie Physique, Bâtiment 349) est l’élément clef de ces études. Cette expérience, unique au monde, permet de suivre complètement la dynamique de fragmentation en détectant en coïncidence les fragments ioniques et neutre(s) issus de la dissociation d’une même molécule parente, avec des détecteurs sensibles en temps et en position. La spécificité de cette technique permet, par l’analyse des corrélations vectorielles, d’étudier le nombre d’étapes de fragmentation et dans quel l’ordre elles se produisent. L’autre aspect unique de cette expérience est la possibilité de suivre la dynamique de fragmentation de la nanoseconde à la milliseconde.


Montage expérimental Arc-en-Ciel installé à ELYSE (Laboratoire de Chimie Physique, Bâtiment 349, Université Paris-Sud).

Interactions ion-dipîole induit

Lors de la fragmentation d’un ion monochargé, la détection en coïncidence avec le dispositif Arc-en-Ciel permet de remonter au type de mécanisme de fragmentation (direct ou séquentiel) et d’accéder au temps de fragmentation. Nous avons exploité ce dispositif original et unique à la photodissociation UV pour étudier l’évolution du temps de fragmentation associé à la rupture directe de la liaison Cα-Cβ dans un ensemble de dipeptides protonés contenant d’une part le tryptophane et d’autre part la tyrosine comme chromophore UV. Bien que les mécanismes proposés pour ces ruptures photospécifiques dans les petits peptides soient similaires avec le tryptophane ou la tyrosine comme chromophore UV, la rupture Cα-Cβ avec le tryptophane donne lieu à la perte du résidu ionique (m/z 130) alors que la même rupture avec la tyrosine conduit à la perte du résidu neutre (masse 107). Cette différence est due aux potentiel d’ionisation des deux fragments. Cependant, le temps de fragmentation mesuré pour la rupture de la liaison Cα-Cβ est toujours très court, proche de la limite expérimentale de 20 ns, dans le cas de la tyrosine et augmente avec la taille du système pour les dipeptides contenant le tryptophane (figure ci-dessous).


Evolution du temps de fragmentation mesuré associé à la rupture de la liaison Cα-Cβ en fonction de m/z de l’ion parent pour les dipeptides contenant (a) le tryptophane (perte du résidu ionique, m/z 130) et (b) la tyrosine (perte du résidu neutre, masse 107) comme chromophore UV. Notons que le mécanisme de fragmentation est différent dans WC et YC.

Ces évolutions de temps de fragmentation sont compatibles avec un modèle d’interaction entre une charge ponctuelle (fragment ionique) et un dipôle induit (fragment neutre). Après rupture de la liaison Cα-Cβ, le fragment ionique et le fragment neutre sont faiblement liés par une interaction de type charge - dipôle induit et forment un complexe. Pour l’ensemble des systèmes contenant le tryptophane, l’ion fragment est identique. Le potentiel d’interaction directement proportionnel à la polarisabilité du fragment neutre augmentera avec la masse du fragment neutre. Cette étude systématique sur un ensemble de dipeptides photoexcités à 263 nm démontre que le temps de fragmentation mesurée est caractéristique de l’interaction des fragments dans le complexe formé après la rupture de la liaison Cα-Cβ.

Référence : Ion-induced dipole interactions and fragmentation times : Cα-Cβ chromophore bond dissociation channel, S. Soorkia, C. Dehon, S. Sunil Kumar, M. Pérot-Taillandier, B. Lucas, C. Jouvet, M. Barat and J. A. Fayeton - J. Phys. Chem. Letters 6 (2015) 2070-2074

Rupture d’un pont disulfure

L’étude de systèmes complexes contenant un pont disulfure est une nouvelle problématique de recherche du groupe. Le premier volet de cette étude concerne la cystine protonée, qui représente le système modèle le plus simple constitué de deux acides aminés liés par un pont disulfure. L’étude de la dynamique de photodissociation à 263 nm (4,7 eV) a permis d’identifier deux types de ruptures de liaisons (figure ci-dessous), l’un correspondant à la rupture du pont disulfure (S-S) et l’autre à la rupture de la liaison (C-S) adjacente. Nous avons montré que la rupture (S-S) conduit à la formation de trois fragments ioniques de m/z différents associés à des mécanismes de fragmentation spécifiques. Les temps de fragmentation mesurés sont tous inférieurs à 20 ns.


a) Résumé des ruptures observées dans la cystine protonée faisant suite à une excitation à 263 nm. Diagrammes de corrélations (ti-tn,yi) des ruptures b) S-S produisant les ions m/z 120, 121 et 122 et c) C-S produisant l’ion m/z 152.

Cette étude nous a permis de mettre en évidence et de caractériser les différentes voies de fragmentations accessibles quand l’excitation UV est localisée au niveau du pont disulfure. La deuxième étape a porté sur la dissociation de systèmes modèles possédant un pont disulfure directement liée à un chromophore aromatique. Nous avons ainsi montré que toutes les fragmentations sont induites par le transfert de proton du groupe amine à l’exception de la rupture homolytique du pont disulfure comme dans la cystine protonée. Ceci a été démontré lors de la protection du groupe amine par l’éther 18-couronne-6.

Référence : UV photofragmentation dynamics of protonated cystine : disulfide bond rupture, S. Soorkia, C. Dehon, S. Kumar, M. Pedrazzani, E. Frantzen, B. Lucas, M. Barat, J. Fayeton and C. Jouvet - J. Phys. Chem. Letters 5 (2014) 1110-1116

Transfert d’électron et transfert de proton

L’excitation à 263 nm de dipeptides contenant soit la tyrosine soit le tryptophane fait apparaitre des voies de dissociation spécifiques que sont la rupture Cα-Cβ et la rupture z. Ces ruptures sont interprétées à l’aide du modèle suivant (figure ci-dessous) : le couplage de l’état ππ* localement excité avec (a) un état ππ*CO localisé sur le groupement carbonyle situé en C terminal suivi d’un transfert de proton donne lieu à la rupture de la liaison Cα-Cβ et (b) un état ππ*CO localisé sur le groupement carbonyle situé en N terminal suivi d’un transfert de proton conduit à la rupture z.


Ruptures (a) Cα-Cβ pour le dipeptide glycine-tyrosine protonée et (b) z pour le tripeptide glycine-tyrosine-glycine protonée indiquées en pointillé.

Pour tester ce modèle nous avons étudié ces voies de dissociation pour différentes séquences de petits peptides en faisant, soit varier la position du proton par rapport au chromophore soit en le bloquant. L’étude de la photofragmentation des peptides contenant la Tyrosine YG, YA, AY, GY et GYG a montré que ces voies de dissociation sont toutes observées lorsque l’état à transfert de charge est accessible énergétiquement avec un photon à 263 nm.

Référence : Photofragmentation at 263 nm of small peptides containing tyrosine : role of the charge transfer on CO, Ch. Dehon, S. Soorkia, M. Pedrazzani, Ch. Jouvet, M. Barat, J. A. Fayeton and B. Lucas - Phys. Chem. Chem. Phys. 15 (2013) 8779-8788

Photofragmentation du Tryptophane protonée et de petits peptides protonés à 263 nm

Ainsi dans le cas du tryptophane protoné, on a montré qu’un fragment ionique qui, d’après sa masse, était associé à une fragmentation en trois étapes provient d’une dissociation binaire rapide en moins de 10 ns. Nous avons aussi pu mettre en évidence que le mécanisme de perte du résidu indolique est un processus de fragmentation direct à l’état excité. Dans le cas du tryptophane protoné ces expériences de coïncidence associées aux mesures femtoseconde et à des calculs ab-initio, nous ont permis de donner une vision complète de la dynamique de fragmentation de ce système. Sur des plus gros systèmes (exemple : Glycine-Tryptophane-Glycine) nous avons pu mettre en évidence des fragmentions non ergodiques et proposer des mécanismes qui relient la structure secondaire du peptide avec les voies de fragmentations.

Références :

- Mechanisms of photoinduced Cα-Cβ bond breakage in protonated aromatic amino acids, B. Lucas, M. Barat, J. A. Fayeton, M. Perot, C. Jouvet, G. Gregoire and S. Brondsted Nielsen - J. Chem. Phys. 128 (2008) 164302

- Ab initio study of the excited-state deactivation pathways of protonated tryptophan and tyrosine, G. Gregoire, C. Jouvet, C. Dedonder and A. L. Sobolewski - J. Am. Chem. Soc. 19 (2007) 6223

- Ultrafast excited state dynamics in protonated GWG and GYG tripeptides, G. Gregoire, C. Dedonder-Lardeux, C. Jouvet, C. Desfrancois, and J. A. Fayeton, - Phys. Chem. Chem. Phys. 9 (2007) 78

- Statistical versus non-statistical photo-fragmentation of protonated GWG tri-peptide induced by UV excitation, B. Lucas, M. Barat, J. A. Fayeton, C. Jouvet, P. Çarçabal, and G. Grégoire, - Chem. Phys. 347 (2008) 324