Nous avons appris avec une profonde tristesse le décès de Michel Barat survenu le 28 novembre 2018 à l’âge de 80 ans.
Michel Barat a joué un rôle éminent en Physique et en Chimie à Orsay, où il a créé son premier groupe de recherche sur les collisions ions-atomes à l’Institut d’Électronique Fondamentale au milieu des années 60. L’essor de ces recherches et plus généralement de la discipline des collisions l’a conduit à fonder en 1977 avec Jean Durup et Florence Fayard le Laboratoire des Collisions Atomiques et Moléculaires (LCAM), qu’il a dirigé jusqu’en 1989. Le développement du LCAM doit beaucoup à son sens physique et à son intuition remarquables, ainsi qu’à sa capacité exceptionnelle à reconnaître et à agréger les talents, réunissant au sein du laboratoire théoriciens et expérimentateurs.
Le leitmotiv de ses travaux de recherche a été l’étude des mécanismes de collisions entre particules atomiques et moléculaires par la mesure de sections efficaces différentielles d’état à état par des techniques de multi-coïncidence et d’imagerie. On retiendra en particulier les thèmes suivants :
Excitation et ionisation dans les collisions atomiques. Développement du modèle quasi- moléculaire et conception du fameux « modèle de promotion électronique » (Fano-Lichten-Barat).
Capture électronique simple et multiple par des ions multi-chargés
Collisions réactives via des états électroniques excités
Fragmentation de molécules et d’agrégats : mécanismes impulsionnels et électroniques.
Plus récemment, il a contribué au rapprochement entre le LCAM et le Laboratoire de PhotoPhysique Moléculaire (LPPM), premier pas vers la création de l’Institut des Sciences Moléculaires (ISMO), en participant au projet « Arc en Ciel » installé au Centre de Cinétique Rapide ELYSE : Étude par des techniques combinées « pompe-sonde » et « d’imagerie résolue en temps » des processus de fragmentation de molécules complexes voire d’intérêt biologique.
Son succès scientifique tient à sa très forte capacité à mobiliser autour de lui des équipes et à créer des mouvements d’entraînement sur des sujets nouveaux. C’était un chercheur doué d’une très grande curiosité scientifique et de capacités d’écoute et de proposition remarquables ; doué d’un sens physique exceptionnel et d’une grande virtuosité expérimentale il s’est toujours montré d’une efficacité hors-norme. Chercheur infatigable, il a gardé un dynamisme et un enthousiasme exemplaires. Michel Barat a effectué toute sa carrière au CNRS, accédant au grade de Directeur de Recherches de Classe Exceptionnelle en 1992. Ces dernières années, devenu chercheur émérite au CNRS, il continuait à venir au laboratoire devenu l’ISMO, et à aider ses collègues par sa culture et ses inspirations physiques.
Michel Barat a joué un rôle de tout premier plan dans l’émergence, la structuration et la maturation de la Physique des Collisions au niveau national et international. Il a œuvré avec pugnacité pour que cette discipline obtienne sa reconnaissance au CNRS. Il a été une personnalité centrale et un organisateur de plusieurs réunions nationales et internationales dans ce domaine. Après avoir été membre de la Section 04 du Comité National de 1966 à 1975, son engagement dans la communauté scientifique l’a conduit à la Présidence de cette instance d’évaluation de la recherche au début des années 1990. La reconnaissance internationale lui a valu d’être Président (Chaiman) de la division de Physique Atomique et Moléculaire de la Société Européenne de Physique de 1989 à 1999.
Nous n’oublierons pas sa perspicacité et sa culture scientifiques, son enthousiasme communicatif, mais aussi son éclectisme, sa bonhomie, et son humour.
Nous exprimons nos très sincères condoléances à sa famille et à ses proches.
Jean-Pierre Gauyacq et Victor Sidis
anciens directeurs du LCAM,
au nom des élèves, collègues et amis de Michel