Nous étudions la physique de l’interaction ions-matière et l’évolution chimique induites par les ions énergétiques au moyen d’accélérateurs d’ions lourds. Il s’agit d’étudier l’impact de l’irradiation et la pulvérisation de solides interstellaires exposés au rayonnement cosmique (matière carbonée interstellaire, mais également d’autres solides moléculaires comme la glace interstellaire présente dans les phases les plus denses de notre Galaxie) .

En effet, dans les conditions froides qui règnent dans les nuages moléculaires denses, les molécules et les atomes de la phase gazeuse sont condensés sur la surface des grains interstellaires. Compte tenu des échelles de temps et des conditions physiques qui règnent dans ces phases denses, une partie de ces molécules doit être ramenée dans la phase gazeuse pour expliquer leur observation par les télescopes millimétriques. Le maintien de ces espèces dans la phase gazeuse dans des milieux relativement denses interroge, car elles devraient rapidement se condenser sur les grains froids de poussière. Cela devrait être encore plus important pour les espèces les plus grandes. Les contributions relatives des différents mécanismes de désorption sont donc d’une importance capitale pour contraindre l’évolution chimique des régions interstellaires à l’aide de modèles astrophysiques, en particulier dans ces nuages denses. Les rayons cosmiques, particules accélérées à grande énergie (ions atomiques, principalement des protons au fer, dans une gamme d’énergie allant du MeV au TeV), sont une source majeure de désorption pour expliquer la présence de molécules organiques complexes dans les nuages denses. Afin de bien connaître l’efficacité de ce phénomène et le quantifier, nous simulons en laboratoire ces processus sous rayonnements astrophysiques.

L’irradiation d’analogues de laboratoire avec des ions dans la gamme 1-500 MeV, et le suivi par spectroscopie infrarouge de la phase solide et par spectrométrie de masse de la phase gazeuse, fournissent des informations importantes pour les simulations des effets des rayons cosmiques : ces expériences peuvent être utilisées pour quantifier les taux de pulvérisation notamment. Les processus astrophysiques ainsi mesurés en laboratoire sont largement utilisés dans la communauté astrophysique pour modéliser l’évolution du milieu interstellaire.

Photo d’une chambre d'irradiation de films moléculaires de molécules polycycliques aromatiques comme cible. Sous bombardement ionique sur accélérateur simulant le rayonnement cosmique (ici à GSI, Darmstadt), ces grandes molécules sont pulvérisées de la surface. Les modifications induites par le faisceau d’ions sur les films sont suivies in situ en phase solide et gazeuse par spectroscopie infrarouge et spectrométrie de masse.
Expériences de simulations du rayonnement cosmique sur accélérateur (ligne IRRSUD au GANIL, Caen) pour mesurer la pulvérisation d’analogues de glaces interstellaires.

Contacts :
Emmanuel Dartois
Marie Godard
Thomas Pino