C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès de notre éminent collègue Sydney Leach, survenu le 24 décembre, à l’âge de quatre-vingt-quinze ans. Sydney a effectué toute sa carrière française (depuis 1946) au CNRS, en étant l’un des premiers Maîtres de Recherche de cette institution. Il a créé une nouvelle discipline, la Photophysique Moléculaire, et a donné ce nom au laboratoire propre du CNRS qu’il a fondé à l’université d’Orsay, et dirigé pendant de nombreuses années. Ce laboratoire est désormais une composante importante de l’Institut des Sciences Moléculaires d’Orsay (ISMO).

Sydney a donné une grande impulsion à la Photophysique Moléculaire dans les années 60 et 70, non seulement par la structuration de la discipline à Orsay et au niveau national, mais aussi en ayant impulsé l’utilisation du rayonnement synchrotron comme source de rayonnement pour étudier la dynamique des molécules. A partir des années 80, ses intérêts ont évolué vers des applications tournées vers l’astrophysique, ce qui l’a amené à poursuivre sa carrière au département Damap de l’observatoire de Meudon, devenu le LERMA.
Sydney a été, avec Paul Felenbok, à l’origine de la construction du spectrographe de 10 m à haute résolution pour l’ultraviolet du vide, implanté à Meudon. Ses contributions dans l’étude des spectres électroniques des molécules et surtout des radicaux et des ions moléculaires sont essentielles et toujours d’actualité. Il a étendu le champ scientifique aux aspects dynamiques et a entrepris l’étude des fullerènes, des acides aminés et des acides nucléiques, ainsi que les tests de laboratoire sur le rôle des ions de molécules aromatiques polycycliques dans le milieu interstellaire. Un de ses derniers projets, « EXPOSE », sur la station spatiale internationale, concernait la survie des graines végétales irradiées par le rayonnement UV dans l’espace.
Sydney était un scientifique unanimement reconnu et apprécié : Fellow de la Royal Society, chevalier de la Légion d’honneur et lauréat du Prix Robin de la Société française de physique. Il a aussi été membre de l’Union Astronomique Internationale et du Comité National du CNRS. Doué d’une grande autorité naturelle tout en étant modeste et discret, bienveillant et chaleureux, à l’écoute de tous et de toutes, Sydney rayonnait par son érudition et a favorisé, grâce à sa profondeur scientifique et à ses connaissances encyclopédiques, de nombreuses collaborations nationales et internationales dans des domaines très variés, aux interfaces de la physique, de la chimie, de l’astrophysique et même de l’astrobiologie. Nous nous souviendrons de lui comme d’un chercheur hors pair, curieux de tout, et comme d’un homme tout à fait exceptionnel.