L’avènement des nouveaux observatoires du milieu interstellaire comme l’Atacama Large Millimeter Array (ALMA) et le NOrthern Extended Millimeter Array (NOEMA), qui observent les objets distants du milieu interstellaire dans la gamme du millimétrique et sub-millimétrique (au sens large, 5 GHz – 1 THz), s’accompagne d’un besoin pressant de données obtenues en laboratoire dans cette gamme spectrale sur des molécules d’intérêt astrophysique.
Dans le but de permettre de nouvelles détections d’espèces moléculaires dans le milieu interstellaire, notre équipe exploite et développe des outils expérimentaux et théoriques de pointe pour étudier des molécules, à la fois stables et réactives. Les molécules qui nous intéressent s’étendent de petits radicaux organiques (diatomiques à 7-8 atomes) aux molécules carbonées à couche fermée de grande taille (une vingtaine d’atomes; PAHs, diamandoïdes et leurs dérivés).
Notre équipe possède une activité instrumentale soutenue effectuée à l’ISMO et sur la ligne infrarouge AILES du synchrotron SOLEIL où nous disposons d’un accès privilégié. Nous enregistrons ainsi les spectres de rotation pure et de ro-vibration des molécules d’intérêt dans une gamme qui s’étend des longueurs d’ondes millimétriques à l’infrarouge moyen où les transitions observées sont équivalentes à des cartes d’identité des molécules.

Spectroscopie des ondes millimétriques à THz à l’ISMO

Nous disposons de spectromètres sub-millimétrique permettant de balayer la gamme 75-1500 GHz au moyen de sources électroniques (par chaîne de multiplication de fréquence), d’un spectromètre large bande (chirped-pulse) dans la gamme 75-110 GHz. Un accès récent au signaux de référence REFIMEVE+ nous permet d’ouvrir un nouvel axe de recherche sur la spectroscopie à haute résolution dans la gamme THz pour laquelle nous développons un spectromètre exploitant une technique de photomélange.
Plusieurs dispositifs nous permettent d’étudier différentes familles de molécules :
– Cellules permettant l’étude de molécules à faible réactivité
– Cellules dédiés aux espèces réactives (radicaux, ions, molécules transitoires) produites par différentes techniques (décharges électrique, radiofréquence, micro-onde, ou ablation d’hydrogène par atome de fluor)
– Jet supersonique équipé d’un système de décharge électrique

Illustration du spectromètre chirped-pulse couplé à une cellule à réaction avec du fluor atomique. Exemple de spectre obtenu en partant de l’acétonitrile (CH3CN) comme précurseur
Illustration du spectromètre millimétrique exploitant une chaîne de multiplication de fréquence couplé à une cellule à réaction avec du fluor atomique et utilisant la modulation Zeeman pour étudier des radicaux. Exemple du spectre du radical CH2CHO produit par déshydrogénation de l’acétaldéhyde (CH3CHO).

Spectroscopie infrarouge lointain à SOLEIL

Notre équipe exploite le rayonnement synchrotron infrarouge lointain extrait par la ligne infrarouge AILES du synchrotron SOLEIL pour enregistrer et analyser les spectres d’absorption d’espèces moléculaires en phase gazeuse. Ces spectres sont enregistrés notamment grâce à un interféromètre à Transformation de Fourier (de type Bruker IFS125) dont la résolution ultime de 30 MHz permet de résoudre la structure rotationnelle d’un grand nombre de systèmes moléculaires. En association avec la ligne AILES et l’interféromètre Bruker, nous avons développé plusieurs montages expérimentaux destinés à l’étude spectroscopiques de famille de molécules très variées :
– Une cellule à grande longueur d’absorption fonctionnant à température ambiante permet l’étude d’espèces carbonées relativement grande ;
– Des cellules à décharge et pyrolyse peuvent être installées pour enregistrer les spectres dans l’infrarouge lointain molécules radicalaires ;
– En collaboration étroite avec le consortium « jet-AILES », un jet supersonique continu permet d’étudier les spectres de complexes moléculaires ainsi que des molécules contenant plus de 20 atomes refroidies dans l’expansion supersonique.
Nous sommes également très impliqués dans la mise en œuvre d’un nouveau spectromètre dont le principe de fonctionnement repose sur le mélange hétérodyne du rayonnement synchrotron avec diverses sources de laboratoire (lasers moléculaires, sources hyperfréquences) permettant d’enregistrer des spectres d’absorption avec une résolution de quelques dizaines de kHz dans la région de l’infrarouge lointain. Ce spectromètre peut être associé avec l’ensemble des dispositifs expérimentaux listés ci-dessus.

Illustration du spectromètre HEROES dont le principe repose sur le mélange hétérodyne du continuum IR lointain de la ligne AILES de SOLEIL avec un laser moléculaire de nouvelle génération. Une portion du spectre IR lointain du méthanol est représenté sur la partie droite de la figure (le spectre calculé est représenté par les barres verticales noires). La résolution spectrale de l’instrument HEROES permet de résoudre des structures spectrales extrêmement denses (trace bleue), par ailleurs inaccessibles avec l’instrument par transformation de Fourier commercial de la ligne AILES (trace rouge).

Contacts :
Marie-Aline Martin-Drumel
Olivier Pirali