Stage de niveau M1, M2, L3 dans l’équipe SYSTEMAE

L’interprétation des observations du milieu interstellaire, en extinction (absorption et diffusion) et en émission, repose sur une modélisation complexe des propriétés photophysiques (c’est-à-dire la compétition entre toutes les voies de relaxation radiative et non radiative des systèmes isolés) des molécules interstellaires et des poussières à l’aide de données de laboratoire sur des analogues. Jusqu’à présent, les analogues des espèces interstellaires de quelques dizaines à quelques centaines d’atomes de carbone ont été très peu étudiés en laboratoire, bien qu’ils puissent contenir jusqu’à plusieurs dizaines de % du carbone interstellaire disponible et qu’ils jouent un rôle crucial dans la physique et la chimie du milieu interstellaire. Leurs propriétés ont été extrapolées à partir d’espèces plus petites ou d’analogues des grains de poussières. La raison principale est le manque de sources de grands systèmes moléculaires et de nanoparticules en phase gazeuse. Ces dernières années, bien que le processus de nucléation de la suie dans les flammes reste largement inexpliqué et pose des problèmes aux chercheurs depuis plus de 40 ans [1], il a été démontré que le processus de nucléation de la suie génère efficacement des espèces de tailles intermédiaires entre les précurseurs moléculaires (jusqu’à la taille moléculaire de C24H12) et les plus petites particules de la distribution des noyaux de suie (contenant environ une centaine d’atomes de carbone). L’objectif du projet est d’exploiter des flammes originales et de produire des systèmes de taille et de structure similaires à ceux suspectés dans l’espace, à partir de la zone de nucléation, et d’étudier leur photophysique dans des conditions simulant celles du milieu interstellaire. La caractérisation structurale, l’absorption électronique, la fluorescence électronique et la fluorescence récurrente (également appelée fluorescence de Poincaré [3]) seront alors étudiées au moyen d’expériences en ligne et ex situ, complétées par une modélisation théorique.
Plus précisément, le projet combinera plusieurs diagnostics laser en ligne de flammes de laboratoire, notamment la spectroscopie de diffusion Raman [2], la fluorescence induite par laser, l’incandescence induite par laser et l’ionisation multiphotonique résonante. Ces expériences en ligne seront réalisées sur des espèces échantillonnées refroidies afin de réduire considérablement la congestion spectrale et de s’affranchir du fond de rayonnement de la flamme (cible T=50K). Ces expériences mettent aussi en oeuvre la spectrométrie de masse par temps de vol (TOFMS) très sensible en utilisant divers schémas de photoionisation allant des processus résonants à 2 couleurs aux processus VUV directs. Ce projet devrait donc permettre de progresser dans l’identification des porteurs des signatures spectrales interstellaires observées en absorption et en émission. De plus, les espèces et leurs réponses spectrales guideront l’interprétation des observations du satellite JWST (James Webb Space Telescope) en cours dans le domaine des longueurs d’onde du proche infrarouge au proche infrarouge.

[1]Martin J.W., Salamanca M. Kraft M.; Prog. Energ. Comb. Sci. (2022) 88, 100956 ; Soot inception: Carbonaceous nanoparticle formation in flames
[2]K.C. Le, C. Lefumeux, T. Pino, Comb & Flame 236, 111817 (2022), DOI: 10.1016/j.combustflame.2021.111817 , Watching soot inception via online Raman spectroscopy
[3]O. Lacinbala, F. Calvo, C. Dubosq, C. Falvo, P. Parneix, M. Rapacioli, A. Simon, and T. Pino, J. Chem. Phys. (2022), DOI : 10.1063/5.0080494 ; Radiative relaxation in isolated large carbon clusters: vibrational emission versus recurrent fluorescence

Location: Institut des Sciences Moléculaires d’Orsay (ISMO), Bât. 520, Université Paris-Saclay, Orsay
Contact: Thomas Pino